Cuba
Roberto Fabelo (1951-)
Roberto Fabelo est un artiste contemporain cubain. Il est à la fois peintre, illustrateur et sculpteur.
Né en Guáimaro, Roberto Fabelo a étudié à l’Ecole Nationale d’Art (diplômé en 1972) et à l’Institut Supérieur d’Art de La Havane (diplômé en 1981).
Ses dessins, huiles et aquarelles tiennent de l’expressionnisme, du surréalisme et même du fantastique, dans la veine d’un Enki Bilal dont on peut retrouver le style, notamment dans ses dessins.
Son travail a été montré dans plus de quarante expositions personnelles et plus de 500 expositions de groupe dans le monde entier, à Cuba, en France, Italie, Japon, Mexique, Espagne et Etats-Unis. Il a également illustré une édition de 2007 de 100 ans de solitude de Gabriel García Márquez.
Il a été décrit par le Dallas Morning News en 2002 comme « l’un des artistes cubain de premier plan ». L’Etat cubain lui a décerné une médaille pour la culture nationale et la médaille Alejo Carpentier pour sa carrière artistique exceptionnelle.
Antonio Gattorno (1904–1980)
Antonio Gattorno a été le premier artiste cubain de sa génération à atteindre une renommée internationale mais reste aujourd’hui très sous-estimé.
Il commence ses études à San Alejandro en 1916 et décroche en 1920 une bourse de voyage en Europe où il arrive doté déjà d’un solide métier. Il fait des études à Rome, en Espagne et enfin à Paris. La connaissance et l’étude de la peinture européenne sont décisives dans son évolution d’artiste. De retour à Cuba, il fait une exposition personnelle (mars 1927) qui résume son voyage d’études et comprend aussi des œuvres peintes à Cuba. Cette exposition prépare la voie à l’Exposition d’art nouveau qui se tient en mai et où il montre, entre autres pièces, son Mujeres junto al río, l’une des premières versions plastiques du criollismo moderniste.
À peine de retour d’Europe, il fait les premières transpositions de la peinture moderne européenne à des thèmes cubains. Les travaux de Gattorno de cette époque (1927 1939) sont devenu l’archétype du primitivisme cubain moderne et ont fixé la norme pour la génération des peintres cubains connu sous le nom de Vanguardia, un groupe qui comprend Wifredo Lam, Victor Manuel et Amelia Pelaez.
À la fin des années 30, il s’établit aux USA (sa première exposition, à la Galerie Georgette Passedoit de New York en 1936, sera même parrainée par Hemingway) où il renonce à la peinture d’inspiration criolla et s’oriente vers lesurréalisme. Hélas, Gattorno ne sait pas gérer sa carrière et, à sa mort, beaucoup de ses chefs-d’œuvres (comme La siesta, peint en 1939) dorment, oubliés, dans son grenier.
Teresa Cabral, nièce du peintre, a hérité de sa collection de tableaux, dessins, estampes, céramiques, mobilier, et d’importants fichiers comprenant des catalogues, des photographies, de la correspondance et une grande variété d’objets personnels et professionnels. Avec son mari Sean Poole, ils ont créé la Fondation Gattorno, monté des expositions et publié un livre sur l’artiste. La redécouverte et la reconnaissance actuelle d’Antonio Gattorno comme l’une des figures majeures de la peinture cubaine est largement due à leurs efforts.
Wifredo Lam (1902–1982)
Wilfredo Óscar de la Concepción Lam y Castilla, dit Wifredo Lam, est né à Sagua la Grande, (Cuba) le 8 décembre 1902 (année de la proclamation de la république, après plus de trois siècles de domination espagnole) et mort à Paris le 11 septembre 1982.
Peintre cubain, initiateur d’une peinture métissée alliant modernisme occidental et symboles africains et caribéens, créant ainsi un langage singulier et contemporain, il fut un proche de Picasso, des surréalistes qui le reconnaissaient comme l’un des leurs.
Sa mère, Ana Serafina Castilla, née en 1862, est une mulâtresse descendant d’Espagnols et de Noirs du Congo déportés. Son père, Enrique Lam Yam, né vers 1818, est un Chinois originaire de la région de Canton qui a émigré vers les Amériques. Ce dernier meurt en 1926, à l’âge de cent huit ans. Son épouse lui survit jusqu’en 1944.
Sagua la Grande est une petite ville sur la côte nord, centre sucrier de la Province de Las Villas. C’est là qu’il passe son enfance, dans un environnement mêlant plusieurs civilisations et croyances : le catholicisme cubain auquel appartient sa mère ; le culte des ancêtres pratiqué par son père chinois ; et les traditions africaines, liées à la santería, que lui apprend sa marraine, Antonica Wilson, dite Mantonica, une prêtresse très renommée de ce rite. Il apprend auprès d’elle les rudiments du culte et de ses mystères, sans jamais être initié. Elle lui ouvre un monde peuplé d’esprits et d’invisibles.
En 1916, Wilfredo et une partie de la famille s’installent à La Havane. De 1918 à 1923, Lam est inscrit à l’Escuela Profesional de Peinture de San Alejandro. C’est à l’âge de 21 ans qu’il prend la nationalité cubaine, étant jusqu’alors chinois par sa filiation.
De 1923 à 1938, Lam part vivre en Espagne. Il demeure le plus souvent à Madrid. C’est pour le peintre une longue période d’apprentissage et de recherches. L’Espagne est aussi pour Lam une terre d’expériences tragiques. Aux douleurs personnelles (la perte d’une épouse et d’un fils en 1931) s’ajoutent les drames de l’Histoire (la montée du fascisme et la guerre civile). Il s’engage auprès des Républicains dès le 18 juillet 1936, participe à la défense de Madrid, puis travaille dans une usine d’armement.
Lam quitte l’Espagne en mai 1938 pour Paris où il s’installe jusqu’en juin 1940. Ce séjour est d’une importance capitale. Il est accueilli par Picasso qui sera pour lui un « incitateur à la liberté ». L’Espagnol lui présente Matisse,Léger, Braque, Miró, Breton, Éluard…, les marchands d’art Daniel-Henry Kahnweiler, Pierre Loeb… Par l’entremise de Breton, il fait la connaissance des surréalistes, Masson, Tanguy, Matta, Ernst… Il peint beaucoup et, dans cette vaste expérimentation stylistique, il reçoit l’approbation de Picasso qui lui dit : « Je ne me suis jamais trompé sur toi. Tu es un peintre. C’est pour cela que j’ai dit la première fois que nous nous sommes vus que tu me rappelais quelqu’un : moi ». Cette affirmation artistique est aussi couronnée par deux expositions qui se déroulent à Paris et à New York en 1939.
La défaite de la France en juin 1940 marque la fin d’une époque. Il abandonne Paris et gagne Marseille où sont réfugiés tous les intellectuels hostiles au nazisme et nombre de surréalistes regroupés autour de Breton. Après quelques mois d’attente anxieuse, ils peuvent quitter le territoire en direction de l’Amérique (avec escale à La Martinique, où il fait la connaissance d’Aimé Césaire – début d’une grande amitié).
Lam accoste Cuba en août 1941. Il se sent dépaysé dans son propre pays – « ce que je voyais à mon retour ressemblait à l’enfer » – révolté par la misère des Noirs sous le régime de Batista. C’est le déclic : ses toiles deviennent des armes qui dénoncent et contestent ; en puisant dans le monde magique de son enfance, en s’inspirant des cérémonies de la santería ou des rites abakuas, il peint le drame de son pays en faisant revivre les mythologies d’une population brimée et asservie. Inspiré et bien entouré, Wifredo travaille avec acharnement. Si La Jungle exposée en 1944 à New York fait scandale, elle est achetée par le MoMA dès 1945. Lam peint désormais dans une liberté absolue tandis que son œuvre est l’objet d’une reconnaissance internationale. Rayonnant depuis Cuba, il se rend en Haïti dès la fin 1945, en France et à New York (1946 et 1948), en Suède (1955), au Venezuela (1955, 1956 et 1957), au Mato Grosso (1956), au Mexique (1957), à Cuba (1958), à Chicago (1958 et 1960). Sans jamais cessé de créer. Cuba, après la révolution castriste, lui réserve un accueil triomphal en 1963.
A partir de 1957, Lam se rend régulièrement en Italie et séjourne à Albissola, petite ville balnéaire de la côte ligure. Il y retrouve de nombreux artistes : Asger Jorn (qui l’initie à la céramique), Fontana, Appel, Matta… À partir des années 1960, Lam produit aussi beaucoup de gravures. Une grande partie de son travail est destiné à illustrer des albums de poètes, parmi ses plus proches amis : Aimé Césaire, André Breton, René Char, Michel Leiris, Tristan Tzara…
En août 1978, il est terrassé par une attaque cérébrale. Il en sort à moitié paralysé et cloué dans un fauteuil roulant. Dès lors, il partage ses années entre Cuba et Albissola. Il meurt à Paris le 11 septembre 1982. Des funérailles nationales sont organisées le 8 décembre à La Havane, célébrant ainsi l’un des plus grands créateurs du XXe siècle.
Amelia Peláez (1905–1981)
Amelia Peláez del Casal est une importante peintre de l’Avant-garde cubaine. Elle est née en 1896 à Yaguajay, dans la province cubaine de l’ancien Las Villas. En 1915, sa famille déménage à La Havane, ce qui lui donne l’occasion d’entrer dans la Escuela Nacional de Bellas Artes San Alejandro. En 1924, elle expose ses peintures pour la première fois, avec une autre femme peintre cubain, María Pepa Lamarque. Elle part pour l’Europe en 1927, s’établit à Paris, visite l’Espagne et l’Italie entre autres.
A Paris, elle prend des cours de dessin à l’Académie de la Grande Chaumière, puis entre à l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts et l’École du Louvre. En 1931, elle commence à étudier avec Alexandra Exter. Elle expose à la Galerie Zak en 1933, et retourne à Cuba l’année suivante.
En 1950, elle ouvre un atelier à San Antonio de los Baños, une petite ville près de La Havane, où elle se consacre, jusqu’en 1962, à son passe-temps favori : la poterie.
Elle a également réalisé plusieurs peintures murales, situées principalement dans des écoles de Cuba.
Elle a reçu des prix dans l’Exposition Nationale des Peintres et Sculpteurs en 1938, et a collaboré avec plusieurs revues d’art à Cuba. Elle a montré ses peintures à la Biennale de São Paulo en 1951 et 1957, et a participé en 1952 de la Biennale de Venise.
René
Portocarrero (1912–1985)
René Portocarrero est considérée comme l’une des figures majeures de l’art cubain et l’un des plus grands artistes du XXe siècle à Cuba. Il a peint sans relâche depuis son enfance, toujours dans sa spontanéité : il n’avait aucune idée du tableau qu’il allait créer jusqu’à ce que le pinceau frappe la toile.
Né dans le quartier d’El Cerro (La Havane) en 1912, René Portocarrero commence à peindre dès son jeune âge et, à 14 ans, entre à l’Académie des Beaux-Arts San Alejandro. Ayant un fort tempérament et incapable de s’adapter à cet apprentissage, il quitte l’institution et commence son propre travail, avant d’exposer au Salon des Beaux-Arts de La Havane.
Portocarrero a été professeur à l’Institut libre de peinture et de sculpture d’Eduardo Abela en 1939. L’artiste a visité Haïti, l’Europe et les États-Unis, où il a inauguré une exposition à la Galerie Julien Levy, à New York, en 1945. Il a également travaillé sur de nombreuses peintures murales et de la céramique. Il est mort à La Havane le 7 avril 1985.
Les œuvres de Portocarrero sont exposées dans les collections permanentes des Musées d’Art Moderne de Sao Paulo, Rio de Janeiro, New York et San Francisco, entre autres.
Mariano Rodríguez (1912-1990)
Mariano Rodríguez, peintre autodidacte, est né à La Havane en 1912. Il a travaillé sous la direction de Rodriguez Lozano au Mexique, en 1936. De retour à Cuba, il ouvre sa première exposition dans un lycée de La Havane, en 1942. Il expose aussi à New York, en 1945, 46 et 48.
En 1941, il peint le premier de ses « gallos » – ces coqs qui lui donnèrent une grande popularité. L’un d’eux, datant de 1941, a été acquis par le MoMA de New-York.
Dans les années 60, il commence à travailler à la Casa de las Americas de La Havane, institution culturelle dont il est nommé directeur du Département des Beaux-Arts en 1970.
En 1981, il a reçoit la orden Félix Varela de primer grado, le plus grand honneur que Cuba accorde aux personnalités de la culture. Il est également élu député.
Mariano Rodríguez est souvent qualifié de « magicien », sachant retranscrire dans ses tableaux les lumières et les formes de la nature. Il était un « rebelle », contre toutes les tendances modernes déjà établies de son temps. Ce qui ne l’empêchait nullement de chercher de nouvelles formes d’expressions. Beaucoup de ses travaux ont été exposées ou sont montrés de façon permanente au MoMA de New York, au San Francisco Museum, à l’Institute of Arts de Chicago, au MAM de Paris, à Stockholm, Mexico, Buenos Aires…
« Quand les critiques ont essayé de caser l’œuvre de Mariano Rodríguez, de la définir, ils n’ont pu, paradoxalement, que retomber sur des adjectifs d’insubordination, tant sa peinture est exubérante, joyeuse, dynamique, essentielle. Comme ces coqs qui, chaque matin, chantent une aube nouvelle. » Mario Benedetti.